Alchimie et Franc- Maçonnerie

 

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HISTOIRE

 

Bien que nous puissions trouver des traces de ce qui deviendra l’alchimie, de l’Egypte à la Mésopotamie, en passant par la Chine et l’Inde, et cela dès la Haute Antiquité, il semble assez difficile d’en fixer une origine claire.

Néanmoins, il parait assez vraisemblable d’envisager une tradition initiatique rattachée au travail de la matière, avec la transmission des secrets et techniques par l’oral et la pratique, de Maître à disciples, à l’image de la tradition des bâtisseurs.

Le mot Alchimie pourrait lui aussi avoir plusieurs origines : Al Kemia en arabe avec le mot Al qui veut dire Principe supérieur et Kemia qui veut dire Terre Noire en référence à l’Egypte ou encore du Grec Kemia qui veut dire éléments ou khumeia qui veut dire mélanges.

A partir de la période hellénistique, le syncrétisme de traditions grecques et égyptiennes permet de donner une existence concrète à l’Alchimie et de commencer à l’illustrer. Dès lors, les principes de graduation du processus, de dualité, de tria prima, des quatre éléments et des qualités élémentales apparaissent.

Le dieu Thot, la divinité de la connaissance devient Thot Hermès puis Hermès Trismégiste, le fondateur légendaire de l’Alchimie à qui l’on attribue les Hermetica et la table d’Emeraude.

Au début de notre ère, les cultes à mystères et les courants mystiques des religions juives et chrétiennes s’entremêlent dans les courants gnostiques. Il en ressort, entre autres, l’idée que la matière est impure suite à la chute de l’humanité. L’esprit y serait enfermé. Il conviendrait donc de le séparer de la matière pour revenir à son origine.

La plupart des textes antiques qui nous sont parvenues sont traduits de l’arabe suite à la conquête de l’Egypte par ces derniers. L’alchimie est introduite dans le monde byzantin et musulman à partir du VIe et VIIe siècle puis probablement dans le monde occidental via l’Emirat de Cordoue et plus tard par les Croisades.

En Occident, jusqu’à la fin du Moyen Age, l’intérêt pour l’étude de la matière va aller croissant puis connaître son âge d’Or à partir de la Renaissance. Les diacres qui se chargeaient de la traduction des traités ont très certainement croisé la route des bâtisseurs des cathédrales ainsi beaucoup d’édifices religieux sont baignés de messages alchimiques. 

Partout en Europe l’explosion de la diffusion des connaissances permet d’alimenter les travaux, la littérature et l’iconographie alchimique, en même temps que la redécouverte de la culture et des mythes antiques. L’Alchimie inspire les artistes, les écrivains, les peintres, les dessinateurs, les sculpteurs. Les traités alchimiques foisonnent, il y a des mystères à déchiffrer, il n’y a pas de réponses absolues et il y a matière à réfléchir, ce qui révolutionne la spiritualité de l’époque.

Malgré les apports et les influences de chacun, l’ensemble des pratiquants partagent les mêmes concepts, les mêmes idées, la même philosophie, les mêmes méthodes.  Les moyens de l’exprimer eux varient  ce qui va donner naissance à un incroyable univers symbolique, fait de messages et d’allégories à décrypter, de secrets à trouver et à comprendre, de pièces épars à rassembler les unes avec les autres afin que le chemin initiatique puisse se tracer.

Au XVIIe  siècle, les Manifestes Rose Croix sont baignés de symbolique alchimique pour illustrer un idéal de « progrès de l’humanité ».

A partir du XVIIIe, la Franc Maçonnerie qui fait sa transition vers le spéculatif en reprend quelques idées et fondamentaux pour élaborer ses rituels. Mais l’avènement de la science fait tomber petit à petit l’Alchimie en désuétude.

Au début du XXe siècle le psychiatre Carl Jung trouve dans l’Alchimie le support idéal pour illustrer son processus d’individuation dans le prolongement de sa réflexion sur l’inconscient collectif et le rôle des mythes antiques dans celle-ci.

 

PRINCIPE

 

Le macrocosme et le microcosme sont de même nature et par conséquent ce qui est en haut est comme ce qui est en bas. Ainsi par la compréhension de la nature, on a la connaissance de l’univers et de sa création.

La création est le passage de la lumière à la matière et il convient donc de faire le chemin inverse pour retrouver l’unité perdue. L’alchimiste considère que l’état le plus élevé de l’être réside donc dans la lumière.

Le Grand œuvre est la réalisation de la pierre philosophale qui doit permettre de faire descendre cette lumière dans la matière.

A mesure qu’il travaille et purifie sa Materia Prima, il se purifie lui-même. Il doit faire corps avec son expérience, Il fait partit de l’œuvre, son élévation personnelle correspond à l’état de sa matière et l’état de la matière correspond à la rectification de l’expérimentateur. Il s’agit donc d’un dialogue avec la matière.

Si on devait résumer le Grand Œuvre de manière simple : « Solve E Coagula » ! Plus explicitement, on pourrait dire qu’il s’agit de décomposer, purifier puis recomposer la matière afin d’en faire un réceptacle de lumière. C'est à dire, dissoudre jusqu'à changer en matière basique et recombiner formant une substance nouvelle.

Le Grand Œuvre se fait en trois partie et sept étapes, Il y a deux principes dans la matière qu’il convient de distinguer. Ils s’illustrent par le masculin et le féminin, actif et passif, volatil et fixe, soleil et lune, ou encore Souffre et Mercure auquel il sera adjoint un troisième principe pour les réunir : Le Sel.

3 Œuvres : Noir, Blanc et Rouge correspondent à trois états successifs de la même matière, c'est-à-dire de la matière brute à la matière rectifiée.

7 Etapes sont  intégrés aux 3 œuvres qui sont appelés : La Calcination, la Putréfaction, la Solution, la Distillation, la Conjonction, la Sublimation et la Coagulation.

Ces sept étapes sont souvent illustrées par les 7 métaux, 7 planètes, 7 notes de musique, 7 couleurs de l’arc en ciel etc…Plus on remonte ces étapes plus on se rapproche de la lumière.

Par la voie sèche elle s’élabore dans un creuset et un athanor, le résultat un compost métallique, qu’il faudra faire cuir et recuire inlassablement.

L’Œuvre au Noir consiste à séparer et à purifier la matière. Il s’agit d’une première mise à mort afin de la faire renaître. Il faut la dissoudre afin d’en séparer le subtil de l’épais, les deux principes opposés et d’en purifier un premier. Après plusieurs opérations répétées, la matière conservée commence à cristalliser, puis apparaissent des rayons qui convergent vers le centre et quand il reste 5 nervures nettes et convergentes avec un point central, l’Etoile est trouvée et nous pouvons passer à l’Œuvre au Blanc.

Partant de l’Etoile, l’Œuvre au Blanc va consister à la recomposition de la matière. Le deuxième principe sera purifié à son tour et associé au premier. Il s’agit de la Noce Chimique, la réunion féconde des opposés qui doit donner naissance au Rebis, au centre de l’Etoile et qui est l’embryon de la pierre philosophale.

Puis, c’est l’Œuvre au Rouge qui consiste en la destruction et la recréation du Rebis en le réduisant en poudre et le faisant cuire à nouveau afin de lui redonner vie et en faisant pénétrer la vraie lumière à l’intérieur afin d’aboutir à la  pierre philosophale.

La pierre philosophale n’est pas pour autant le bout du chemin, cette pierre n’est pas à pleine puissance, elle a pris une première multiplication et peut en recevoir encore.

Il convient donc pour l’adepte de continuer à augmenter ses connaissances et son rayonnement puisqu’il est devenu à la fois réceptacle, catalyseur et diffuseur de cette lumière.

 

FRANC MACONNERIE

 

Le symbolisme alchimique nous accompagne dès le début de notre parcours et la recherche de la parole perdue est équivalente à la recherche de l’unité pour les alchimistes.

Pour les Francs Maçons et pour  y arriver, le processus initiatique de mort et de résurrections successives afin d’avancer vers l’éveil de la conscience est tout à fait comparable.

Le cabinet de réflexion du REAA présente un préambule du grand œuvre de même qu’il est le préambule de l’initiation. Bien que ces symboles ne soient plus revus en loge, son idée reste présente et le VITRIOL en est un résumé. C’est la préparation de la Materia Prima : La Pierre Brute.

 

Le premier degré permet à l’initié de dissoudre le profane qui est en lui. Après avoir été purifié par les 4 éléments, l’initié qui s’est ouvert à un chemin nouveau est placé au Nord pour y faire son œuvre au Noir, par un travail intérieur, verticale, à l’ombre et dans le silence.

Il est placé sous le Septentrion, Septem Trium, les laboureurs du ciel en Hébreux, qui est aussi un nom que se donnent les alchimistes.

De la pierre brute, il va passer à la pierre taillée, en suivant le chemin de l’étoile, il va passer dans la deuxième partie du parcours, au Midi, dans la lumière et dans l’action. Un travail extérieur, s’ajoute au travail intérieur, l’horizontale s’est ajoutée à la verticale et c’est de cette croisée qu’il va pouvoir percevoir le centre du cercle.

 

Le deuxième degré va le faire grandir et l’amener vers un chemin de connaissance.

Par connaissance, il faut comprendre qu’il ne s’agit pas simplement d’un savoir acquit, mais plutôt du ressenti, du sentiment personnel éprouvé par la compréhension et l’assimilation des symboles.

Il commence à faire corps avec son œuvre et sa pierre.

Passant de la pierre taillée à la pierre cubique à pointe, il est prêt à percevoir une nouvelle lumière. Après avoir traversé l’étoile il est de nouveau mis à mort afin de renaître à nouveau et de devenir ce réceptacle disposé à recueillir ainsi qu’à transmettre la lumière de la maîtrise.

La pierre cubique à pointe est la pierre philosophale des Francs Maçons. Le triangle sur le carré ou encore le pyramidion sur le cube représente l’esprit sur la matière. D’une pierre chaotique, elle est devenue une pierre ordonnée et d’une pierre ordonnée, elle est devenue une pierre d’ornement.

Elle est parfois représentée avec une hache qui symbolise l’union du maillet et du ciseau, de l’actif et du passif, du mouvement et de la précision : Peut être l’union de Boaz et Jakin : « Dans la force, Il établira. »

 

Le chemin ne s’arrête pas là pour autant. Le Maître trace les plans pour continuer à bâtir le Temple, augmenter ces connaissances et son rayonnement, et faire monter cette pierre en haut de l’édifice afin qu’elle y trouve sa place et qu’elle puisse éclairer.

 

ALCHIMIE INTERNE

 

Le symbolisme est un langage universel. La connaissance est unique mais les moyens de la diffuser sont multiples. Au travers des mythes, des contes et des légendes, les mêmes philosophies et allégories sont habillées de cultures différentes.

Les traités alchimiques asiatiques sont eux à la fois opératifs et spéculatifs. La création est inachevée et il appartient à chacun de la parachever.

Dans le Tao, il est proposé une voie externe mais aussi interne. Cette dernière permet d’évoluer vers le corps de gloire, le corps de lumière. La pierre philosophale se confectionne à l’intérieur de soi même.

Le Yin et le Yang sont deux forces opposés s’entremêlant l’une dans l’autre et ayant chacune en soi une part de l’autre afin de faire un tout. Ils représentent parfaitement la réunion des oppositions fécondes recherchées par les alchimistes occidentaux.

 

Au début du 20e siècle, Carl Gustav Jung en a trouvé une illustration parfaite pour décrire ses théories sur la psyché et le processus d’individuation. Il pense que la portée et la puissance d’évocation du symbole, des mythes et des traditions sont enfouies en chacun de nous, dans notre inconscient. L’étude du symbolisme permet  donc d’établir un dialogue avec lui, donc de s’en rapprocher pour le comprendre et peut être d’en avoir la maîtrise. Conscient et Inconscient ont des relations opposés qu’il convient d’apaiser et d’imbriquer afin de trouver l’équilibre, l’union des contraires, vers la pleine conscience, le Soi, c’est à dire la totalité de son psychisme.

 

La maçonnerie et l’alchimie cherchent le perfectionnement de l’individu afin d’élever sa conscience. La quête d’un initié, c’est l’unité. Le travail et la réflexion sur le symbole consentent cette rentrée en soi même afin de créer cette fusion intérieure qui doit nous permettre d’accéder à un autre niveau de conscience.

 

Références:

Mutus Liber - Altus / Les demeures philosophales - Fulcanelli /             Le Mystère des Cathédrales - Fulcanelli / Patrick Rivière / Patrick Burensteinas / Jung un chemin vers soi Frédéric Lenoir.

 

T:.S:

30 mars 6022



01/04/2022
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