LES ROSE-CROIX

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« La vision du Rose-Croix », eau-forte par Rembrandt (1652)

 

 

Je commencerai mes propos par un avertissement… :

Si vous tapez sur google comme recherche « rose croix », vous tomberez en premier résultat sur le site https://www.rose-croix.org/ .

Les propriétaires du site se présentent de la façon suivante :

 

Faisons la même recherche, en ajoutant « secte » et « assemblée nationale », et nous tomberons sur le rapport de 1999 intitulé « Rapport sur la situation financière, patrimoniale et fiscale des sectes, ainsi que sur leurs activités économiques et leurs relations avec les milieux économiques et financiers »https://www.assemblee-nationale.fr/dossiers/sectes/r1687anx.asp#P4635_64156].


Je ne sais pas dans quelle mesure ils sont dans la continuité, ou non, des Rose-Croix des siècles passés…

Cet avertissement vous ayant parvenu, je reprends le fil de ma planche.

 

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INTERESSONS-NOUS D’ABORD A LA SYMBOLIQUE QUI POURRAIT NOUS VENIR EN PREMIER : ROSE, ET CROIX.

 

LA CROIX

 

La croix est commune à de nombreuses civilisations, prenant diverses formes et significations.

Il est des croix grecques, des croix latines, des croix égyptiennes, des croix celtiques, des croix pattées, …

Elle relie le ciel et la terre…

Comme le carré, la croix symbolise la Terre.

La croix, dirigée vers les quatre points cardinaux, est la base de tous les symboles d’orientation.

La symbolique de la croix semble infinie…

Chez les chrétiens bien sûr elle symbolise la croix levée sur laquelle a été crucifié Jésus Christ. Elle symbolise le Christ lui-même.

 

 

LA ROSE

 

La rose, quelle est sa symbolique habituelle ?

Rose, symbole de l’éphémère, de la beauté, de l’agréable flagrance ?

« Mignone, allons voir si la Rose est éclose » a écrit Pierre de Rondsart.

Dans le dictionnaire des symboles[1], à l’entrée « Rose » : 

« Remarquable par sa beauté, sa forme et son parfum, la rose est la fleur symbolique la plus employée en Occident. Elle correspond dans l’ensemble à ce qu’est le lotus en Asie, l’un et l’autre étant très proche du symbole de la roue (…). La rose est, dans l’iconographie chrétienne, soit la coupe qui recueille le sang du Christ, soit la transfiguration des gouttes de ce sang, soit le symbole des plaies du Christ. Un symbole rosicrucien figure 5 roses, une au centre et une sur chacun des bras de la croix. Et puisque nous citons les rose-croix, remarquons que leur emblème place la rose au centre de la croix, c’est-à-dire à l’emplacement du cœur du Christ, du sacré-cœur. (…) La rosace gothique et la rose des vents marquent le passage de la rose à celui de la roue. (…) La rose, par son rapport avec le sang répandu, paraît souvent être le symbole d’une renaissance mystique : Sur le champ de bataille où sont tombés de nombreux héros, poussent des rosiers et des églantiers. (…) Blanche ou rouge, la rose est la fleur préférée des alchimistes dont les traités s’intitulent souvent rosiers des philosophes. »

 

Je pense alors au tableau de Marie-Antoinette où on la voit avec une rose à la main… Quel est le sens caché ?

 

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De Louise Elisabeth Vigée le Brun, 1783.

 

 

ET QUELLE SYMBOLIQUE DE L’ASSOCIATION DES DEUX ?

 

La croix est de bois mort qui a été coupé. La croix du Christ représente un instrument de mort.

La rose placée au centre de la croix est symbole de renouveau, de renaissance.

****

Après ces citations ou réflexions liées à la rose et à la croix, entrons dans la légende des Rose-Croix.

 

 

LES ORIGINES DU ROSICRUCISME

 

Dans le passé, les Rose-Croix ont fait couler beaucoup d’encre, mais sans qu’on puisse identifier de manière certaine des adeptes. Certains estiment que nous sommes en présence uniquement d’une inspiration littéraire de sachants et savants du XVIIème.

Certains estiment que les Rose-Croix ont réellement existé avec des origines fort anciennes qui remonteraient aux templiers, aux croisades, aux échanges avec les savants arabes, voir plus loin encore…

Leur savoir serait issu de la Gnose, de la Kabale, de l’alchimie, des évangiles…

 

Les premiers écrits célèbres sont publiés en Allemagne au début du XVIIème avec la parution de trois ouvrages :

-         « Les Noces Chymiques de Christian Rosenkreuz » (1616) : conte hermétique, initiatique, voir alchimique.

-         La « Fama Fraternatis » : expose la légende de Christian Rosenkreuz qui aurait fondé l’ordre en 1459.  Elle incite les savants à y adhérer. Elle débute en ces termes : « Nous, frères de la fraternité de la R.C., offrons notre salut, notre amour et nos prières à tous et à chacun qui liront notre présente Fama d’intention chrétienne ».

-         La « Confessio Fraternatis » : engage les adeptes à étudier les livres sacrés en dehors de tout dogmatisme et dénonce la corruption de la papauté. On y trouve aussi des théories issues des connaissances scientifiques de l’époque.

Ces trois ouvrages seraient attribués à Jean-Valentin ANDREAS (1568-1634). D’autres auteurs estiment que la Fama et la Confessio sont des œuvres collégiales.

L’opinion d’alors se demanda s’il s’agissait de véritables communications des RC, ou bien de simples plaisanteries.

Charles Naudé (1600-1653), bibliothécaire de Richelieu et de Mazarin, sembla prendre la chose au sérieux, et fit paraître à Paris un ouvrage « Instructions à la France sur la vérité de l’histoire des Frères de la Rose-Croix » par lequel il divulgua à son tour la légende de Christian Rosenkreuz (CR).

CR serait né en 1378 et mort en 1484. Son corps aurait été retrouvé par quatre sages en 1604 dans une grotte. La grotte était éclairée par « un soleil qui recevait sa lumière du Soleil du monde ». Elle contenait quatre inscriptions : « Jamais Vide », « Le Joug de la Loi », « Liberté de l’Evangile », « Gloire entière à Dieu ».

Christian Rosenkreuz semble être un personnage mythique : « Rose-Croix Chrétien ». Les voyages qu’on lui attribue, à l’instar des sages de l’antiquité, en fait presque un initié des doctrines orientales.

La Fama résume la vie de Christian Rosenkreuz : né de parents pauvres, mais nobles, il est placé à l’âge de 6 ans dans un monastère. Il apprend le grec et le latin et on l’initie à la magie. A l’âge de 16 ans, il entreprend un voyage en Terre Sainte. Malade, il séjourne à Damas avec les Sages de Damcar. Ils lui enseignent les secrets de la nature. Après cette première initiation, il traverse l’Egypte, la Lybie et atteint Fez. On voit ainsi qu’il est mis en contact avec les savants arabes qui partageaient leurs savoirs. CR demeure 3 ans à Fez. On lui enseigne une croyance basée sur l’harmonie du monde. Il reçoit la révélation de l’unité universelle qui remet l’homme à l’unisson avec Dieu, le ciel et la terre. Dès lors, initié aux grands secrets de l’univers, il revient en Europe pour rapporter cette sagesse traditionnelle et fonder une nouvelle société. Incompris en Espagne, il retourne dans sa patrie, l’Allemagne. Au bout de 5 ans de solitude, il souhaite poursuivre avec des compagnons dévoués, et s’entoure de 3 compagnons. (…).

 

Manifestes placardés sur les murs de Paris

Un matin d’août 1623, les Parisiens eurent la surprise de lire, placardés sur les murs de Paris, des lignes manuscrites :

« Nous, députés du Collège principal des Frères de la Roze croix, faisons séjour visible et invisible en cette ville par la Grâce du Très Haut, vers lequel se tourne le cœur des Justes. Nous montrons et enseignons sans livres ni masques à parler toutes sortes de langues des pays où nous voulons être, pour tirer les hommes nos semblables d’erreur de la mort ».

Ils seront appelés « les Invisibles » et auraient été au nombre de 36, dispersés à travers le monde par groupe de six.

Ce manifeste a également été considéré comme une plaisanterie.

 

Les Rose-Croix, réels ou supposés, font sur le plan religieux preuve d’une grande dévotion chrétienne et d’indépendance vis-à-vis des dogmes de la papauté : ils entendaient nier toute autorité dogmatique et ils s’attachaient à l’observation directe et indépendante des phénomènes de la nature, en utilisant l’expérimentation : sciences naturelles, alchimie, médecine. Ils sont associés à l’alchimie, et l’ouvrage « Les Noces Chymiques de Christian Rosenkreuz » (1616) seraient remplis de références alchimiques.

 

Bien que proche des thèses de Luther, force est de constater qu’ils durent vite entrer en clandestinité et ne pas se dévoiler, voir renier leur appartenance, afin de ne pas être vus comme des hérétiques. Jean-Valentin ANDREAS par exemple, indiqua que le livre « Les Noces Chymiques de Christian Rosenkreuz » avait été écrit à l’âge de 16 ans, sans doute pour lui donner moins d’importance que souhaité.

 

A ce stade, l’existence d’une vraie fraternité RC, non limitée à certains écrits, n’est pas démontrée de façon absolue.

 

Certains auteurs estiment que les Rose-Croix pourrait avoir une origine plus ancienne qui remonterait aux templiers. Notamment par l’étude de la Divine Comédie de Dante qui a des références aux templiers et aux thèses RC.

 

Certains personnages connus auraient été RC :

Dante Alighieri (1265-1321), poète, auteur de « La Divine Comédie » ; Nicolas Flamel (1330-1418) : alchimiste ; Rabelais (1500-1553) ; Jean-Valentin Andreas (1568-1654) : auteur présumé de plusieurs ouvrages rosicruciens ; René Descartes (1596-1650) : savant et philosophe, auteur du « Discours de la Méthode » : il a nié son appartenance. Leibniz (1646-1716) : a nié également.

 

On le voit, beaucoup de savants, de sachants, ayant à cœur la médecine, l’analyse expérimentale, l’analyse de la nature : la vérité n’est pas dans les livres analysés de manière dogmatique. De ceci ils se rapprochent de la gnose ?

 

COURANT ROSE-CROIX DU XVIIIEME SIECLE A NOS JOURS (hors FM)

Je ne développe pas les courants RC modernes fort nombreux.

 

RC et FM

Le Rosicrusisme est donc une doctrine (ésotérique ?) chrétienne qui se veut libre des dogmes et interprétations de l’église, qui place sa foi dans Jésus, et qui puise ses racines dans les traditions anciennes. Mais la modernité est intégrée, la science trouve sa place dans cette doctrine.

Pour certains, l’arrivée du Rosicrusisme en Angleterre serait à l’origine de la FM moderne au début du XVIIIème siècle (diffusion des écrits allemands). La FM aurait alors plus de lien avec la doctrine RC que les maçons opératifs.

Nous aurions des références communes : Kabale, hermétisme, Alchimie, Gnose… Le secret, la fraternité, le dépassement de soi, la construction de son être.

Au REAA, 1er degré, je n’ai pas trouvé d’allusions directes aux RC.

Toutefois, dans la symbolique de la croix, on retrouve certains de nos symboles : la Perpendiculaire du Second surveillant, le niveau du 1er surveillant, l’équerre du Vénérable Maître.

En outre, la croix peut résulter de l’assemblage de 4 équerres. Elle peut être vue comme une représentation graphique du nombre 4. On y voit les 4 points cardinaux, ou encore les 4 éléments : air, terre, eau, feu, comme les 4 épreuves de l’initiation.

La Rose se retrouve aussi dans les rosaces des cathédrales…

Comme indiqué précédemment, « Les Noces Chymiques de Christian Rosenkreuz » auraient de nombreuses références alchimiques ; mais c’est aussi une histoire d’épreuves, d’initiation, de dépassement de soi. CR est invité aux Noces du Roi et de la Reine. Ils représentent le Soleil et la Lune, qu’on retrouve sur notre tableau de loge.

 

La FM se veut un ordre initiatique et traditionnel : quelque part, une partie de notre histoire philosophique appartient bien à la tradition des Rose-Croix…

 

Philippe CAS.°.

[1] Dictionnaire des symboles, Jean Chevallier et Alain Gheerbrant, coll. Bouquins



27/04/2021
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