La Montagne
La montagne
L'ascension
Avant de commencer l'ascension qui constitue une aventure dont la durée et la difficulté sont inconnues il convient de quitter le monde de la plaine et d'abandonner la dimension horizontale au profit de la verticalité.
C'est au pied de la montagne que l'on dispose du choix de renoncer ou de poursuivre son cheminement.
L'ascension s'effectue par une mise à nue du grimpeur qui se libère de toutes ses passions et habitudes afin de faire corps avec la montagne.
Le montagnard est un nomade qui se déplace en abandonnant ses bagages pour qu'ils n'entravent pas sa progression
Lors de l'ascension le franc maçon expose ses doutes, ses certitudes, ses interrogations qui momentanément l'angoisse et le font vaciller ou encore lui apportent la plénitude d'une paix intérieure.
Sur le chemin conduisant à son dépassement, il suit l'itinéraire qui lui est adapté, toute hâte serait blâmable et dangereuse C'est une montée sans vanité, le FM est voué à monter dans un silence qui l'invite à l'écoute intérieur, son ascension est solitaire puisque ses impressions, ses sensations ne sont pas descriptibles, elles lui sont propres, chacun ressent différemment son ascension mais chacun partage le plaisir de cette quête commune.
Mais cette solitude n'est qu'illusion, car chacun est lié à l'autre par une corde qui impose de s'adapter au rythme de l'autre, ou il n'y a pas de plus fort ni de plus faible mais chacun peut compter sur l'autre.
Cette corde est aussi solide que la chaîne qui nous unit, elle protége de la chute et évite qu'un frère s'égare ou se perde dans le brouillard. Cette corde symbolise le lien fraternel et charnel entre les hommes qui permet à une cordée de former un tout dans une parfaite cohésion.
L'union permanente est alors indispensable à toute ascension commune et à toute édification du temple dont les fondations se construisent avec les frères car l'homme seul ne réalise rien de grand.
Il n'en demeure pas moins que la montagne se compose d'une multitude de voies qui convergent vers la cime que chacun est libre d'emprunter pour atteindre son but.
Ces chemins s'enroulent autour de la montagne et permettent ainsi de la gravir lentement,
Ainsi, la vision de la vallée est toujours la même, mais à chaque fois elle se fait d'une hauteur supérieure donnant une vision toujours plus élevée du trajet parcouru et une perception différente de la vallée.
Comme notre parcours initiatique qui nous élève vers la lumière et change notre vision des choses.
L'important ne consiste pas dans l'accès à la cime, puisque les cimes s'ajouteront les unes aux autres comme les haltes succéderont aux étapes et cela sans discontinuer.
L'essentiel exige de ne pas suspendre l'ascension.
Car l'ascension n'est pas simple, ni facile , elle nécessite des efforts permanents sur des sentiers escarpés, des prises de risques, des choix , mais aussi des erreurs de direction ou de fausses pistes qu'il faut savoir reconnaître pour se mettre à nouveau en route vers une quête perpétuelle
Le FM dans sa pérégrination traversera les deux versants qui composent la montagne, « l'adret »qui est exposé au soleil et « l'ubac » ombré.
Ces deux versants coexistent et ne sont jamais séparés, ils se touchent,
Cette dualité créatrice forme un tout, la montagne, que le FM devra dépasser pour atteindre l'unité que constitue celle-ci.
Cette dualité n'est pas figée, mais évolue en permanence, c'est ainsi que la clarté met fin à la précédente obscurité par la course incessante du soleil et de la lune.
La montagne se situe sur un axe
Chaque nuit pour l'observateur terrestre, les constellations tournent autour de l'étoile polaire, telle une vaste coupole qui pivote autour d'un axe.
La montagne en tant que figure symbolique peut être vue sous deux aspects distincts :
Vue d'en haut, l'image de la montagne suggère l'idée de centre au tour duquel les choses s'organisent ;
Vue d'en bas, c'est l'axe verticale qui domine, la forme dominante est celle d'un triangle, de la pyramide, du cône.
S'agissant de la Montagne centre
Autrefois dans le cadre des mentalités primitives, la région environnante à la montagne constituait un monde organisé, habitable pour l'homme et au delà de ce périmètre, il y avait le chaos, les ténèbres.
Ce qui est à l'intérieur de ce périmètre et sûr, et stable, l'ennemi sous quelque forme que ce soit ne peut pénétrer, l'enclos devient sacré.
De là germe l'idée d'établir des centres qui seront chacun « une image propre du monde », la montagne centre symbolise l'enclos fermé et sécurisé qui pourra se transformé en une enceinte sacrée.
Pour ce qui est de la montagne axe
L'axe d'en haut se confond avec l'axe d'en bas, si l'on se réfère à l'adjectif latin Altus qui a donné en français le terme haut. A son origine, celui ci signifiait aussi bien bas que haut exprimant ainsi une continuité entre le ciel et l'enfer.
L'axe vertical passant par le centre est l'image la plus simple et la plus significative de la montagne comme symbole.
L'axe de la montagne passe par le sommet et rejoint l'étoile polaire.
L'image de la montagne et celle de l'étoile polaire se trouvent ainsi associées.
Dans plusieurs traditions, la coupole céleste « prend appui » sur la montagne centrale qui devient une sorte de gigantesque pilier « axe du monde ».
Ce concept, illustre le processus symbolique que l'axe d'en haut se confond avec l'axe d'en bas
Il n'y a qu'un seul axe le long duquel les dieux descendent du ciel sur la terre et le long duquel les hommes s'élèvent de la terre vers le ciel, l'axe introduit dés lors un aspect dynamique, un sens de mouvement d'ascension, et de descente qui s'est illustré notamment par Moïse sur le mont Sinaï « Israël établit son campement devant la montagne. Moïse monta vers dieu et l'Eternel l'appela du haut de la montagne ».
Le sommet est le point le plus haut de l'homme et le plus bas des dieux.
Il est le seul niveau possible de rencontre et par conséquent le symbolisme de « l'ascension » est le seul moyen de permettre d'entrer en contact avec le divin.
Le symbole de la montagne en tant que signe d'ascension, d élévation, de transcendance et de sacré à un caractère universel qui se retrouve dans les traditions de nombreux groupes culturels.
Dans la tradition Hébraïque :
Il y a le mont Thabor et Le mont Sinaï qui est la montagne de la révélation où Moïse reçoit les tables de la loi
Dans la tradition Islamique
La montagne Kâf est la montagne mère de toutes les montagnes du monde, elle est accessible aux hommes dont elle est séparée par une région infranchissables. Elle est à la limite entre le monde visible et le monde invisible et personne ne sait ce qu'il y a derrière, elle entoure le monde terrestre, assimilé à un disque circulaire plat.
Dans la tradition Chrétienne
Les monts de la tentation, des béatitudes, de transfiguration, de l'ascension (mont des oliviers), du calvaire (mont du Golgotha)
La symbolique du mouvement de l'ascension se retrouve également dans la FM ou sont figuré les épreuves de la descente dans le monde souterrain suivit d'une renaissance par une élévation… vers la lumière.
Le candidat est en effet plongée dans une caverne où il est isolé, coupé du monde, confronté.au silence, à la solitude, à l'immobilité et à l'obscurité, c'est au dessous de la montagne dans sa caverne qu'il dispose encore du choix de renoncer à gravir les multiples étapes que constitue sa montagne.
Il est figé et immobile dans son cabinet de réflexion avant de se lancer dans un mouvement perpétuel d'ascension que rien ne devrait arrêter.
La montagne et son sommet introduisent pour le franc maçon une notion de niveau ainsi que celle du passage à un autre monde par le biais d'une mort féconde.
La montagne dont la forme habituelle est le triangle n'est pas sans rappeler pour le FM celui du delta lumineux qui figure à l'orient entre le soleil et la lune.
La montagne est le lien entre la terre et l'espace qui assure par cet axe un mouvement d'élévation vers la lumière.
L'axe de la montagne permet donc le passage de l'équerre au compas puisque l'équerre représente l'espace terrestre et plus généralement la matérialité alors que le compas permet de tracer des cercles qui représentent la pensée, l'esprit, l'espace.
L'homme a donc combiné ces deux symboles, pour matérialiser la transcendance ou l'ascension en représentant sous la forme d'un carré, la terre au dessus de laquelle figure un demi cercle représentant l'espace.
Cette aspiration à la transcendance a été reproduite dans les basiliques chrétiennes, dont la coupole hémisphérique surplombe quatre murs ou quatre colonnes en carré.
On la retrouve également au portail des églises romanes dont le tympan demi-circulaire surplombe la porte en forme de rectangle.
On la retrouve encore dans le plan au sol de certaines églises romanes dont la nef rectangulaire se prolonge à l'est par une abside semi circulaire.
Pour moi la montagne a de nombreux points communs avec la FM puisque l'ascension de la montagne s'assimile à l'ascension vers une quête personnelle avec une progression lente comprenant le franchissement d'étapes et de niveaux,
L'union des frères de la loge est comparable à une cordée qui permet de gravir toujours plus haut et dans de meilleures conditions.
La montagne a toujours une apparence identique alors que tout évolue, tout se transforme comme le frère qui entre en maçonnerie.
Enfin, la montagne pour moi est un lieu intemporel ou le temps semble suspendu comme dans notre loge lors de nos travaux.
Et la montagne est surtout un des rare lieu ou le limites n'existent pas, ou les chemins sont libres, les directions ouvertes à tous et dont la seule limite c'est moi, c'est vous.
24 septembre 6003