Rassembler ce qui est épars par 2 Compagnons

 « Rassembler ce qui est épars »

 

Lorsque l'Expert, à l'invitation du Vénérable Maître, ouvre sur l'autel des serments le Volume de la Loi sacrée, c'est à la première page de l'Évangile selon Saint-Jean que se trouve le signet.

Dans l'ordre maçonnique, et plus particulièrement le Rite Écossais Ancien et Accepté, tel que nous le pratiquons en France, ce volume de la loi sacrée est une des trois grandes lumières.

C’est précisément dans le prologue de cet évangile qu’on lit:

 « Rassembler dans l’unité, les enfants de Dieu dispersés ».

Cet écrit est assimilable au sujet de notre planche « rassembler ce qui est épars »

On pourrait l’interpréter comme : Rassembler les individualités autour d’une unité d’action ou de pensée.

Mais la « pensée unique » n’est-elle pas contraire à la démarche maçonnique ?

L’unité autour du Grand Architecte de l’Univers, n’est pas une unité de pensée mais une unité de démarche.

Rassembler ? ou Assembler ?

Construire ? ou Réunir ?

Assembler répond à une progression arithmétique. Il n’y a qu’une notion de réunion, de compilation, d’assemblage.

Rassembler est une progression géométrique.

Evidemment, cette progression géométrique correspond mieux à démarche maçonnique, aux échanges en loge.

Il y a, dans cette notion de rassemblement, une dynamique. Les idées, les valeurs, les esprits se dynamisent plus qu’ils ne s’ajoutent.

Rassembler dans la diversité.

Le mot « épars » a rarement une acception positive.

Il s’agit plus souvent d’un éparpillement, d’une dispersion, que d’une diversité.

Dans la citation de l’évangile de Saint Jean, nous trouvons cette notion d’égarement.

« Les enfants de Dieu dispersés » sont les brebis égarées qu’on retrouve plus loin dans les évangiles.

Mais pour le franc-maçon, ce qui est épars, ce n’est pas ce qui est dispersé, en désordre, ce n’est pas ce qui est perdu. Mais simplement, peut-être ce qui est enfouis.

Ce qui est épars, c’est la diversité de l’individu. Cette diversité qui en fait un être.

Toutes ses valeurs, son éducation, ses racines, ses acquis, ses connaissances, ses contradictions.

Rassembler LES diversités pour en construire UNE unité en conservant les valeurs de la diversité ..

Rassembler ses diversités, ses valeurs, ce n’est pas « gommer » ses aspérités. C’est au contraire les développer chacune au profit de la construction de l’être, individu.

C’est, les faire converger vers une structure de pensée. Non pas en une pensée unique mais en une pensée riche de sa complexité.

La Franc-maçonnerie dans son cheminement, permet à l’individu de travailler, de développer, de construire, étape par étape sur ses propres diversités, ses propres contradictions.

Chaque étape procède de la précédente et prépare la suivante dans une construction géométrique.

Dans le cabinet de réflexion, le postulant est intrigué par une formule qui lui est alors hermétique : V.I.T.R.I.O.L.

C’est un des premiers symboles maçonniques visible et interrogatif qui incitera le postulant, devenu apprenti, à aller chercher au plus profond de son EGO épars.

C'est en voyageant au centre de nous-même que nous trouvons la Lumière.

Mais qu’est-ce qui est au centre de nous-même ? Sinon notre propre diversité, nos propres contradiction ?

Les symboles comme les outils sont proposés à tous de la même manière.

Mais l’outil, comme le symbole, peut et doit être appréhendés par chacun en fonction de sa personnalité, de son vécu, de sa propre perception.

Appréhendé, avec ce qui est épars en lui et autour de lui. Enrichi des diversités.

Travailler sa pierre, c’est créer l’unité de son être entre la verticalité et l’horizontalité, entre son l’esprit et son cheminement. Aller chercher au plus profond de soi ses ressources, ce qui est enfouis, presque oublié.

Chaque degré est une consolidation, une mise en forme, un assemblage des diversités éparses.

Comme il est demandé à l’apprenti de se construire sur ses propres valeurs spirituelles, il est demandé au compagnon de se perfectionner sur les valeurs humanistes.

A chaque fois, il est demandé de réunir ses forces, ses valeurs.

L’œuvre à réaliser ne se trouve pas dans un activisme quelconque mais dans le développement et les échanges - tant parmi les Franc-maçons que les non maçons - des ferments qui suscitent l’éveil, puis la prise de conscience puis l’émergence d’idées telles qu’elles permettent à ceux qui en sont les receveurs et les transmetteurs, d’acquérir et de communiquer sur les valeurs de l’homme.

L’universalité dans l’unité mais non dans l’uniformité

Il a été question dans ce premier développement de la recherche de sa propre vérité. L’Apprenti Franc maçon rassemble en lui ce qui est épars;  il visite sa terre intérieure.

Mais à quoi servirait sa propre vérité si elle n’était pas confrontée à la vérité des autres. L’exercice à mon sens serait vain car il engendrerait des postulats, des certitudes, finalement des dogmes qui le ramèneraient à la case départ.

Attardons nous un instant sur la recherche de la vérité dans une démarche collective.

Rassembler les Frères d’une même Loge, dans une même démarche, avec les mêmes outils, autour des mêmes symboles, est un exercice qui ne prend sa véritable dimension que si nous lui donnons un sens ; mais quel est ce sens ?

La nature de notre engagement « volontaire » doit tendre vers un idéal et ce chemin progressif se matérialise par notre travail collectif en Loge. Les éléments épars que nous sommes prennent corps et vie, s’harmonisent dans et par notre rituel. Le rituel est le ciment, la matière qui nous unis les uns aux autres. Nous cessons d’être à cet instant des particules élémentaires ; d’individuels nous devenons collectifs pour former ensemble l’entité de la loge; elle reste une dans sa diversité.

Nous devons par une démarche unifiante, retrouver l’unité, génératrice de la connaissance et  la possibilité d’approche de l’absolu.

L’individu est 1 dans sa diversité, au même titre que la Loge est une dans sa diversité.

« Rassembler ce qui épars » est à la fois, le commencement, et la fin;

la méthode et le but.

Rassembler ce qui épars » c’est le sens de l’existence, la quête d’une vie, c’est pour le franc maçon construire le temple de l’humanité :

Le sien en tant qu’individu, Contribuer à la construction du votre en tant que frère, Construire le notre en tant qu’homme.

Nous ne cessons jamais, dans cette démarche, de revenir à l’unité, unité qui nous permet de tracer la perspective de notre idéal commun.

Unité, égalité, diversité, prennent ici leur sens premier, primitif, le socle sur lequel nous devons bâtir notre Idéal.

Entre terre et ciel, puisant au plus profond de soi même, le Franc Maçon voyage vers son idéal et matérialise ainsi, (ce que nous dit le rituel lors de la chaîne d’union) le vaste domaine de la pensée et de l’action.

La chaîne d’union, domaine de la pensée et de l’action symbolise le rassemblement des esprits épars

« Rassembler ce qui est épars » devient tangible et se cristallise dans une spiritualité active qui nous invite à voyager dans le monde profane pour répandre à l’extérieur ce que nous avons construit à l’intérieur.

La chaîne d’union, invite au voyage et réunit la pensée et l’action, la verticalité et l’horizontalité.

(C’est une chaîne de fraternité dans laquelle on reçoit et on donne en permanence. Elle est le lien essentiel entre le matériel et le spirituel)

Réunir et magnifier les différences. Ne pas les soustraire, ne pas tenter de les effacer. Au contraire, les cultiver, les travailler pour renforcer l’union.

Rassembler en une unité de lieu, la Loge ; et de démarche, la Franc-maçonnerie, toutes les diversités de chacun des individus.

Prolonger à l’extérieur le travail effectué en loge, c’est prolonger l’enrichissement des diversités.

Aller puiser à l’extérieur les ressources nécessaires à sa construction pour enrichir son être et enrichir la loge.

Pour terminer, en paraphrasant Rousseau nous dirons que la franc-maçonnerie est :

« dans chaque Franc maçon un acte pur de l’entendement qui raisonne dans le silence des passions sur ce que l’homme peut exiger de son semblable et que son semblable est en droit d’exiger de lui ».

« Le miroir de la vérité (écrit Victor HUGO) s’est brisé au milieu des sociétés modernes. Chaque partie en a ramassé un morceau. Le penseur cherche à rapprocher ces fragments, rompus la plupart selon les formes les plus étranges, quelques-uns souillés de boue, d’autres, hélas, tachés de sang. Pour les réajuster tant bien que mal et y retrouver, à quelques lacunes près, la vérité totale, il suffit d’un sage, pour les souder ensemble et leur rendre l’unité, il faudrait un Dieu. »

 

Daniel CHA:.et Fabrice GRE:.

Planche commune des Compagnons au 1er Degré

26 octobre 2005


16/11/2007
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